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La vie à Mialet n'a pas été un long fleuve tranquille
Au cours des siècles les querelles entre hameaux n'ont pas manqué et je me souviens de la réflexion d'une vieille personne native du quartier d'Aubignac qui m'avait confié, que, dans la vie courante, le quartier haut était souvent oublié en comparaison avec le quartier bas. Entendons que le quartier haut était dans la commune le regroupement de tous les hameaux au-delà de la plaine des Plans (Aubignac, Les Aigladines, Brugairolles / Pégairolles), et le quartier bas tous les autres (Mialet village, Luziers, Paussan, le Pradinas), les Puechs inaccessibles directement par Mialet et plus proches de Saint Sébastien avaient une considération d'autonomie particulière.
Héritant de mes ancêtres du don de mettre mon nez où il ne faudrait pas, je me suis toujours demandé pourquoi malgré le temps, cette vieille animosité surgissait parfois en fond d'écran.
C'est en faisant le ménage dans mes archives que j'ai retrouvé un article de Bernard Atger publié dans "Le lien des chercheurs cévenols" qui relate un épisode très animé de la vie du village au XVIIème siècle.
Résumons les faits.
En 1651, François de Vignolles, sieur de St Brès, épouse Marie de Savin habitant le château d'Aubignac apportant avec sa dote tous ses biens et droits de l'héritage de son père Jacques de Savin. Les mariés s'installent au château d'Aubignac et y entreprennent de profondes transformations.
Le château d'Aubignac
Le territoire de Mialet est partagé entre deux seigneuries, celle d'Aubignac dont dépendent les hauts quartiers des Aigladines, de Brugairolles et Pégairolles, tenue par François de Vignolles et celle de Mialet dont dépendent les hameaux de la vallée Paussan, Luziers, le Pradinas, les Puechs, tenue par Balthazar de Natte.
François de Vignolles et Balthasar de Nattes siègent au Conseil politique aux côtés des Consuls.
En 1666, le prieur Jean Baptiste Gebalin se plaint aux Consul du non-paiement de la dîme par le Sieur d'Aubignac qui par ailleurs avait des arriérés de la taille que les Consuls n'arrivent pas à percevoir ainsi que des dettes de la communauté impayées elles aussi, enfin plaintes et procès contre François de Vignolles se succèdent entre 1657 et 1678. D'autres faits, subornation de témoins, abus d'influence font de François de Vignolles un fieffé filou. François de Vignolles est assisté dans ses méfaits de ses trois fils et quelques soldats résidant au château qui n'hésitent pas à rançonner les paysans qui passent sur le chemin.
En 1679, l'intendant d'Aguesseau contraint par ordonnance le sieur d'Aubignac à payer ses dettes et décide de lancer une enquête.
Au cours de cette enquête qui dura quatre jours, vingt-neuf déposants sont entendus dont trois femmes, vingt-cinq de Mialet, trois de La Fage, des Aigladines ou de Brugairolles et un de Saint Jean du Gard et constituent un dossier de dépositions de quarante-cinq pages.
La plainte la plus grave concerne l'assassinat de Balthazar de Natte le 18 juillet 1678 où des femmes de Mialet attaquèrent physiquement le seigneur d'Aubignac. Six personnes déposent sur ce fait et incriminent ouvertement des faits François de Vignolles. Par ailleurs, violences, vols et autres exactions sont portées à la charge du seigneur d'Aubignac souvent accompagné de ses soldats en armes.
Finalement, six témoignages concernent l'agression du sieur de St Brès sur Balthazar de Natte, sept autres sur le viol d'une femme, tentative de viol, violences et vol de chaussures, deux concernent la confiscation de mulets et deux autres d'extorsion de fonds, onze encore font état de violences du seigneur, de ses fils ou de ses soldats, cinq encore de violences au sujet de la pêches dans le Gardon, cinq autres du refus de paiement de dettes, sérieux palmarès au tableau du sieur d'Aubignac.
A La révocation de l'Edit de Nantes, les affaires ne s'arrangeant pour personne, Monsieur de St Brès probablement décédé, c'est son fils ainé, Jean-Jacques qui réside à Aubignac. Comme la grande majorité des Mialétains, il a adjuré le 10 novembre 1685 avec son épouse. Il est défini comme "rusé, intrigant, d'une expression passable mais traître ; au fond ne valant rien". Durant la guerre des Camisards, il se trouve capitaine d'une compagnie.
Le fils cadet, François, sieur du Fesc a servi quelques temps dans l'armée comme enseigne au régiment du Marquis de Montpezat, défini lui aussi comme "dangereux".
Le troisième fils, Louis sieur de la Font ne se fait pas remarquer.
La seigneurie de Mialet est rachetée en 1701 à Guillaume de Natte par noble Jean de Caladon sieur de la Caze époux de Marguerite de Sallens de St Jean du Gard.
Cette portion d'histoire montre à quel point les habitants de Mialet avaient d'antipathie envers le sieur d'Aubignac et combien celui-ci de ressentiment pour eux et sur douze années de conflits, la mémoire publique a été fortement impactée laissant sans aucun doute des traces qui se perpétuent involontairement de génération en génération.
J'apportais là une réponse très personnelle à ma curiosité, mais peut-être que des lecteurs auront des compléments d'histoire à apporter.
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